Toc, toc, toc, Tortue, sors ta tête, le soleil est revenu !

Toc, toc, toc, Tortue, sors ta tête, le soleil est revenu !

« Chaque petit pas effectué est déjà une victoire face à la maladie. Si vous courez et que vous sentez que cela vous fait du bien, mais qu’au bout de dix minutes, vous êtes déjà essoufflé, ce n’est pas grave. Cela veut dire que votre cœur a davantage besoin d’entraînement. »

Pour se remettre d’une dépression, rien de tel que de se faire du bien. Si le repos est primordial, les médecins conseillent également des activités et des sorties dans le seul et unique but de se reconnecter à la vie.

Toutefois, cela ne va pas de soi car la maladie prive de toute envie celles et ceux qui en souffrent. De surcroît, à l’idée de passer du bon temps, on se culpabilise facilement – « Pourquoi irais-je au cinéma alors que je suis en arrêt de travail ? » – avant de remettre en question la réalité de son état – « Normalement, quand on est malade, on se repose à la maison ». (Ré)apprendre à se faire du bien n’a rien d’évident.

Je suis infiniment reconnaissante envers mes proches d’avoir insisté sans relâche pour m’aider à sortir de ma coquille. Il leur a fallu de la ténacité pour persévérer à me conseiller de sortir, faire du sport, voir mes amis, lire un livre, aller au musée ou je ne sais quoi, alors que je me bornais à leur répondre, d’un ton désagréable, « non, ça ne sert à rien, je ne veux pas, vous m’embêtez à la longue ! » Il me fallait plus de temps. Il fallait que cela vienne de moi.

Jusqu’au moment où j’ai commencé à être davantage réceptive. À me dire, pourquoi pas ? Dès lors, le plus difficile fut de faire le premier pas. Quand je me mettais à douter, je me répétais autant que possible « pour aller mieux, tu dois t’ouvrir petit à petit au monde qui t’entoure », ou encore « Toc toc toc Tortue, sors ta tête, sors ta tête, toc toc toc Tortue, sors ta tête, le soleil est revenu ! » (merci à ma fille de m’avoir fait découvrir cette chanson).

Dès lors, il y avait deux pièges dans lesquels ne pas tomber (bien sûr, je n’y ai pas manqué) : aller trop vite et vouloir trop en faire.

Mais alors, par où commencer ? Cassons immédiatement le mythe : il n’existe pas de recette magique qui fonctionnerait à tous les coups pour tout le monde. Trois-cents grammes de yoga, quatre-cents grammes de méditation, dix décilitres de sport, quarante heures de couture, un soupçon de lecture, dix-huit sorties entre amis, et le tour n’est pas joué. Je ne suis pas défaitiste mais réaliste. Chacun trouve ce qui lui convient en tâtonnant. Il faut essayer, oui, mais se forcer, non.

Par exemple, j’avais souscrit à une application de méditation. Je n’ai jamais accroché. Chacune de ces séances guidées devenant une corvée, j’ai finalement décidé d’arrêter. À contrecœur car je percevais ce rétropédalage comme un aveu d’échec. Puis, grâce à ma pratique cérébrale quasi-constante, je suis parvenue à me raisonner : « n’importe quoi, tu n’es pas nulle, ce n’est pas pour toi un point c’est tout. Passe à autre chose. Parmi l’éventail infini de possibilités qui s’offrent à toi, tu trouveras bien plusieurs cordes à ton arc ». Par la suite, j’ai découvert que je me plaisais davantage à m’arrêter, chez moi ou à l’extérieur, debout ou assise, et à fermer les yeux pour m’imprégner de la saveur de l’instant. Cette nouvelle habitude s’est mise en place en son temps. Avant d’arriver à trouver ce point d’équilibre, je suis passée par maintes étapes. Le tout est de trouver la force pour ne pas se décourager.

Chaque petit pas effectué est déjà une victoire face à la maladie. Si vous courez et que vous sentez que cela vous fait du bien, mais qu’au bout de dix minutes, vous êtes déjà essoufflé, ce n’est pas grave. Cela veut dire que votre cœur a davantage besoin d’entraînement. Si vous optez pour le yoga, ne vous jetez pas sur le premier cours venu (à moins de vous y sentir vraiment à l’aise). Pour ma part, j’ai essayé trois écoles différentes avant de trouver la bonne. À ma deuxième tentative, je me souviens de ce professeur qui n’avait rien trouvé mieux que de me stresser car « je ne m’ancrais pas assez bien au sol et qu’il n’était pas content ». Je n’ai pas insisté.

Dans mes prochains articles, je vous présenterai les différentes activités qui ont été bénéfiques pour moi. Rien d’exhaustif, aucune injonction, seulement des conseils qui, j’espère, pourront porter leurs fruits pour certains d’entre vous. Je m’intéresserai à quatre piliers distincts : bouger, s’ancrer, s’évader et créer. À présent, sans être malade, j’essaye d’appliquer ces principes dans ma vie quotidienne. Vous n’imaginez pas à quel point cela m’a changée.

En dehors du prisme de la dépression, nous vivons dans un monde mis sous pression où le stress peut naître à tout moment. Dans ce cadre, trouver du temps pour soi, aussi court soit-il, aide à lâcher prise, se déconnecter et prendre du recul sur ce qui nous arrive. Notre corps est bien plus qu’une enveloppe sans relief. Il y a tout un monde à l’intérieur de nous, d’une incroyable complexité, qui ne demande qu’à être écouté. Faute de quoi il se fait entendre, parfois bruyamment. Et ça peut faire très mal. Certains tombent facilement malades à intervalles réguliers tandis que d’autres réagissent de façon beaucoup plus grave – comme dans le cas de la dépression. Avant d’en arriver là, laissons de la place à nous-mêmes dans notre liste de tâches pour ne pas laisser nos émotions nous gouverner.